jeudi 15 juillet 2010

Le précipice des tournesols ( archipiel 33 )


certains jours Juana La Del Pipa n'a pas d'intestin grêle.
à sa place, le froid des anneaux de la chaîne qui entrave, le froid des calabozos du Penal Del Puerto si noirs qu’on n’y voit pas ses mains  .
elle le chasse en riant avec la guasa des matriarches habituées aux effronteries des vendeurs de beignets. comme quand elle descend de la plaza de toros de Jerez, les ongles cassés d'avoir serré le bois de l' éventail fiché dans son corsage.
parce qu'il fait chaud.
parce qu'aujourd'hui Paula, su Rafae, aurait pu voler aux dieux l'équation de la moitié d'une véronique.
le reste du temps Juana se signe, du bout de ses doigts de lavandière en les trempant dans l'eau bénite des flaques de la solea por buleria.
.


« il n’y a pas de mauvais destin » lança ta mère en saisissant le volant de sa robe déformée par son abdomen plein de toi. 
près de la canne de Luis El De La Maora elle avait dansé , caressant les planètes.
au milieu des graines de tournesol éparpillées
tu te souviens, Juana.
tu plisses un pois de ta jupe.



Juana alors se lève,
la nitroglycérine d’un Veragua dans les reins.
Anda Juana
carrosse colossal
la mygale sombre dans ta bouche
tisse avec le soleil nucléaire des tientos
le temps précis
regarde comment nos yeux se ferment
comment la peau flétrit plus vite.

Anda Juana
Anda
chante
le
précipice.



nb : la photo en noir et blanc est de Gilles Larrain ( vue à l'expo "Prohibido el cante" à mont-de-marsan, una maravilla, dont j'attends le catalogue. le portrait serré en couleurs est signée Ana Palma - sur le site deflamenco.com ).
Le dessin "de tête" est de Miguel Alcala. le texte a "des couilles" m' a dit le type. je lui renvoie le compliment. Miguel, "chacho", merci pour ta générosité et ce trait, incomparables..
nb 2 : le moun, j'y pars demain , donc los pinchos seront au frigo  (ou dans la huche à pains, c'est mieux ) pendant quelques temps.

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