vendredi 15 mars 2013

Théophanie subliminale (a Sol y Moscas )




...qui de vous grossiers belluaires
qui combattez de pubères bicornes- engraissés
aux tables de Capoue- , saignés
par des bourreaux juchés sur des piedestals
de chair malade, ferait des fioritures
face à des poignards fulgurants
frémissant d'ire et de fureur ?

Qui sa main perfide osa poser
sur le front frisé du roi de la prairie ?
dans le grand vent des campagnes où soudain il se retourne
et agite ses poignards
qui de vous impunément
défia sa colère ?
(...)
Son éclair lui vient de Zeus, son trident
de Poséidon ; dans sa tour brûle
le feu sacrée sans la royale licence
d'Héphaïstos; et ses roues de fer
que jamais
Vulcain dans sa forge ardente
n'eût pu fabriquer avec sa science métallurgique,
sillonnent la terre, tandis que sur ses flancs
le Serpent Voyageur, unissant
et nouant sa tête et sa queue,
a pu souder
les continents avec ses écailles froides.
(...)
Ô Géryon,  notre père, que jamais nous ne soyons
vassaux des hommes et des chevaux !

Fernando Villalon/ La Toriada/ Ed.Mare Nostrum/ Trad. Jacques Issorel

vendredi 8 mars 2013

Cante y baile por Derecho(s)


Marre de voir et d'entendre "...et la journée de la femme " par-ci et "...oui, un beau jour, vraiment , ce vendredi pour nos femmes, qu'on adore, hein ? " par-là.
Le 8 Mars est la date choisie, non pas pour se surprendre à dire" qu' ah bé, c'est vrai, elles existent, les pauvres bouchons, faut faire avec hein  ?... maint'nant ", mais pour rappeler les droits des femmes, certainement parmi les plus bafoués dans le monde. Y punto.

Bien que cette taylorisation langagière m'insupporte et me fait penser qu'une fois encore la pensée globale et locale, plurielle et particulière se retrouve soumise à la broyeuse idéologique, il faut tout de même en passer par là pour ne pas édulcorer la véritable dénomination de cette célébration qui , bientôt, sera rangée au même titre que la fête des secrétaires, nous rendant juste soucieux d'offrir un bouquet de fleurs à la personne de notre choix.

Donc, ne pas faire docte sur ce sujet me paraît tache ardue mais bon, en exergue et en hommage une vidéo où apparaissent Rosario " La Tremendita" , cantaora de "veras", et Rocio Molina , bailaora extra-ordinaire, pour célébrer l'histoire de ces femmes, chanteuses, danseuses ou guitaristes, aficionadas cabales, mères, soeurs et filles qui ont gagné le droit de sortir des cercles familiaux ( et le devoir d'y rester aussi, elles n'ont rien "lâché"), de s'affranchir des clichés ( et garder le droit de se les réapproprier pour mieux les "disjoncter") et parer à l'adversité des codes familiaux ou tribaux (et choisir de les transmettre avec bienveillance, comme un chemin de vie et pas comme une montée au calvaire).
Un tel duo célèbre l'histoire de ces femmes qui va, pour résumer à grand trait, de Carmen Amaya portant pantalon sur les scènes internationales et faisant frire ses sardines sur les sommiers du waldorf Astoria, en passant par Carmen Linares et son formidable travail sur "La mujer en el cante" un des disques indispensables à toute discographie un peu sérieuse, à ces travailleuses - Ana Peña, María Bala, Anica la Periñaca, Juana Vargas, Frasquita de Utrera par exemple -ramasseuses de pois chiches et d'olives,  qui dans la brutalité des années post guerre civile et franquistes affirmaient leur dignité et leur pugnacité,  une présence et un légat au travers de ces juergas de fin de journée où elles aussi, loin des regards réprobateurs des clans ou des sectaires, jetaient leurs chants et leurs danses pour participer à ces réunions, vecteurs de diversions aux fatigues et aux peines engendrées par le labeur extrême de ces " corrales de gañanias",  "réserves" des terres immenses des señoritos à main d'oeuvre bon marché.
Toutes, elles sont un pan immense de l'honneur du flamenco. Et leur droit à la scène, à la création et à la tradition nous est indispensable.
Voilà.
C'est dit.

Nb : à noter l'excellent livre d' Estela Zetania " Flamenco de gañanias" ( Ediciones Giralda )