mercredi 24 juillet 2013

Mont2 : tas de laine 2013

Tendance générale : après avoir gémi de froid tout ce printemps l'aficionado geint de chaud en ce début d'été. C'est vrai que venir à Madeleine cette année ce fut vivre 5 jours et autant de nuit sous tas de laine tellement nous eûmes l'impression permanente d'haleter comme enfermés sous un poncho céleste. Mais bon. Sol y moscas, que diantre !

Dimanche. Les caraques sous les pins crissent dans le bleu rouge vert artificiel du Moun qui s'embrase et canonne. La bouteille de Figeac pond ses oeufs d'outre de nuit dans les verres. On savoure les dernières heures au jardin, loin du bruit. Les 6 Escolar ad patres disparaissent dans l'air embaumé de sarments sauf un, Cantanero, première corde vibrante d'une course au lasso qui a laissé sur nos dos d'esclaves du toro-toro peu de zébrures et aucune plaies. N'en déplaise aux zélotes. Mais la présence est un fait et il a plané sur l'après-midi une odeur de combat. C'est primordial. Devant Cantanero Rafaelillo a fini hystérique, braillant son adrénaline, terminant avec vulgarité une faena où plusieurs fois le fauve sembla prendre le dessus mais où finalement le murciano imposa cette vertu simple : ne pas concéder le tempo de l'affrontement, mettre son cœur au milieu et le faire battre plus fort que celui du taureau.

Samedi. Il y a quelques heures on regardait les cuisses des filles danser au travers des verres de Gin Tonic si défectueux en Gin et en Tonic qu'une seule question se pose au réveil : pourquoi ce mal des pieds à la tête ? Ah, je n'aurais jamais du suivre les diableries éthyliques du petit taureau fou madrilène. Des petits ou  même des grands taureaux fous, on en vit peu l'après-midi. Dans la camade du A couronné giclaient toujours un ou deux même trois jokers dézingués , rappelant au monarque Victorino qui l'avait fait roi. La vuelta à Mocito sorti en 5° position cachait le mauvais jeu abattu sur le ruedo montois. Pourtant, là aussi la partie ne fut pas dénué d'intérêt. Il y avait cette manière de distribuer les coups de reins, les charges, les retours qui donnaient un regain à la corrida telle qu'on l'aime, celle qui ressemble à cet instant où les joueurs de tarot posent leurs yeux sur les cartes et échafaudent les stratégies en pariant sur le possible de l'impossible. Alberto Aguilar fut le seul à tenir garde contre. Beau début de faena ployée, sincérité des appels, souci d'une tauromachie sans excuse. Son échec à l'estoc relevait du même panache. Il n'embrouilla personne avec la facilité d'un passage à faux ou d'un saut de carpe. Aguilar : torero.


Vendredi. Le fifre de Jean-luc est devenu célèbre dans toute la Plumaçonnerie. Râlez, vilipendez, quolibez voyageurs d'outre-Gascogne et vous autres insensibles à l'acidulé du zef que distille le gars Laboudique : quand un béret a mis son idée sous sa cloche, rien ne pourra le réfréner. D'autant que l'ami a su polir ses effets : qu'un tercio de banderilles se passe mal, qu'un taureau mette en difficulté la cuadrilla et sa musique se cloue d'elle même le bec. Bien, gouyat ! La ritournelle jouée par les pensionnaires du Tajo y La Reina fut d'un autre tonneau , de bout en bout ma non troppo : andante mais sans passion, sans épaisseur et sans allegro. Ils trahissaient la sauvagerie, ils échouaient dans le combat. Heureusement qu'un nouveau chef d'orchestre prit soudain la baguette à main gauche,cette zurda de la vérité, pour enclencher ce qui restera sur ma rétine le point d'orgue de mon tas de laine de souvenirs : Fandiño. que borrachera de ole sortie du plexus, ceux dont tu sais que tu ne peux les retenir. Si tu fais ça , jeune amicionado qui découvre ce sentiment si bizarre de ne plus s'appartenir, de ne plus se sentir corseter par les édificateurs de la pesée des oreilles coupées en 4, eh bien sache que toute ta vie tu le regretteras...Malheureusement il y a des aigreurs de partout et en voyant sortir a hombros les deux autres toreros et surtout le mayoral de la course on se disait devant tant de ridicule et d'irrespect que les pharisiens seront toujours à la fête tant que les marchands du temple hilares leur balanceront de tels colifichets à la figure. Porca Miseria.

Jeudi. Je passe juste pour dire combien Ponce soufflette sa leçon aux babines des impétrants dès qu'une bestiole donne dans la couardise de bon aloi. Chaque muletazo semblait dire : " Prenez-en de la graine, je repasse l'an prochain pour ramasser les copies". Les "taureaux" furent de Donald Cardwell del Cuvillo. Amen.

Mercredi. Tout début a une saveur à part. Le plaisir de serrer sur sa poitrine les ami(e)s et de se dire : "Allez, que Madeleine soit belle" depuis plus de trente ans est encore plus musqué. Il y avait ce jour-là un cartel qui calibre une feria. Toros de Fuente Ymbro. Au résultat : à la fontaine je fus et en fait de Brau* je revins avec des brocs gorgés de peu de caste. Pas sans intérêt pour l'aficionado j'en conviens. Mais assez bancal pour que les totalitaristes de l'éradication du Domecq où qu'il se trouve puissent  théoriser leur ressentiments, avec raison d'ailleurs ( ce qui rend l'aficionado aficionophrène). La corrida telle la Piste aux étoiles de notre enfance put à loisir se mettre en place. Les dompteurs étaient là : jambes écartés, chevilles prêtes à s'entortiller, rodomontades et plastrons affûtés. Ils firent les pitres aussi mais de la qualité exécrable des montreurs de fesses à tout va ! Ce furent aussi des bricoleurs de pauvre génie puisqu'ils font partie de l'engeance des inventeurs du toreo à vis perpétuelle qui leur permet d'enfoncer le taureau -et chaque jour un peu plus la tauromachie- vers les gouffres de leur perte de substances. Heureusement vint un radeau et à son bord une méduse d'Orduña , Ivan Fandiño. Il y a des toreros dont on sait, on palpe, on contemple la racha, la plénitude avec le sitio pour abscisses et le poder pour ordonnées, l'inspiration en asymptote comme en plus. Fandiño ce fut terrible pour moi, il me rappela Rincon de cette époque bénie où nous avalions les kilomètres à la recherche des morceaux de puzzle de notre aficion. Le colombien les avaient cimentés. En quelques coups de muleta impavide, en quelques moments où les cuisses de l'homme se révèlent prendre racine dans la terre ocre d'une arène, où les zapatillas s'enfoncent pour dénicher les lémures et les farfadets, Fandiño venait de remettre un coup de torchis sur toutes les pièces. Merci, Torero.

Et comme le veut une tradition africaine pour ce que Fandiño m' a offert je lui dois un retour. Ce sera une citation, tronquée ou ajustée comme on voudra, de Bataille (dans "L'érotisme") : le toreo " ne signifie pas la mort, au contraire, mais la mort est engagée dans sa recherche". 

nb : la photo est de Muriel Haaz.

*Brau : brave en catalan

 

mardi 7 mai 2013

Demain !!!


Casse-croûte matutinal, novillada sans chevaux, agapes sur les hauts de Morlanne, pause-café-folle blanche et "siestôte", copa, recopa y a los toros aux arènes Mitou Capdeville. Et longue tertulia s'il le faut , mais au comptoir. Le bonheur, quoi. Nos vemos, pues.

mardi 30 avril 2013

La casa negra

Pas le temps d'écrire. Le temps, ce sable...
pourtant Manuel, le dernier de la casa de Los Mairena, vient de partir.
Mais certaines fois ne pas en dire plus, laisser monter l'odeur de l'orage des terres à chardons dans la viscosité des silences, c'est cardinal. Suit alors l'envie d'un cante et de son chaos de "pureza".
Señores Antonio, Curro y Manuel a Vd le toca :



Gracias, mil gracias Jose Maria Velazquez y el equipo de "Rito y geografia del cante" otra vez por traer esas maravillas.

mercredi 17 avril 2013

Abou



Séville, Lundi 15 Avril en ce jour abrite Abou le vénéneux.
Il dort enroulé dans la fraîcheur du botijo de Jose Antonio Camacho
de La Puebla del Rio.
Qui gratte le goulot
Soudain ?
Le djinn démailloté furieux depuis sa gargoulette aperçoit la mer en feu jeter de l'argile sous les zapatillas trempées de tumeur mandarine
une corne
son éclair
se découpent un mouchoir
un pacte d'oubli
percent la poitrine du vénéneux ajoutent à la constellation dispersée sur sa peau
un grain de lune.

Abou, il est tard, la nuit est là. Il est saoul, il ne comprend pas pourquoi, assis sur un bord de trottoir de la calle Circo.
Il est tard, Abou rentre chez lui, une tache de vin sur sa chemise blanche, quand il la frotte il sait juste que son cœur bat plus fort. Plus fort et plus lentement.

"Como temblaba mi corazon madre
como temblaba mi corazon solito por la calle..."


lundi 1 avril 2013

Pedro Llen : le collectif dans la dernière ligne droite



Bon ,c'est pas pour dire mais ça urge ! Quoi ? le 8 Mai...Le collectif "Pedro Llen" cherche encore des fonds, des dons et des propositions, de l'aficion et des biftons pour que ce jour commémoratif , celui des morts qui ont su résister à la barbarie, soit celui où d'autres braves viendront mourir dignement , la bouche close et en livrant combat, bien loin des abattoirs terribles, anonymes et sinistres. Ce sextet de classe , un résistant à la fadeur ambiante du campo bien comme il faut - j'ai nommé Juan Sanchez Fabres, aidé de sa famille et de ses amis- se propose de le faire lidier à Saint-Sever, arène Henri Capdeville à qui de son andanada des limbes rien ne ferait plus plaisir.
Pour "ceusses" qui auraient loupé un épisode , le mieux est d'aller se rencarder là.
Pour les "zaujusse", sachez qu'on peut s'adresser directement au collectif par le biais de ces coordonnées :
Antoine Capdeville 0633150282 ou Luc Larregain 0640224066
collectifpedrollen@gmail.com

Nb : un lien vers l' interview claire et efficace du collectif par Pedrito du blog pure aficion, ici. 


vendredi 15 mars 2013

Théophanie subliminale (a Sol y Moscas )




...qui de vous grossiers belluaires
qui combattez de pubères bicornes- engraissés
aux tables de Capoue- , saignés
par des bourreaux juchés sur des piedestals
de chair malade, ferait des fioritures
face à des poignards fulgurants
frémissant d'ire et de fureur ?

Qui sa main perfide osa poser
sur le front frisé du roi de la prairie ?
dans le grand vent des campagnes où soudain il se retourne
et agite ses poignards
qui de vous impunément
défia sa colère ?
(...)
Son éclair lui vient de Zeus, son trident
de Poséidon ; dans sa tour brûle
le feu sacrée sans la royale licence
d'Héphaïstos; et ses roues de fer
que jamais
Vulcain dans sa forge ardente
n'eût pu fabriquer avec sa science métallurgique,
sillonnent la terre, tandis que sur ses flancs
le Serpent Voyageur, unissant
et nouant sa tête et sa queue,
a pu souder
les continents avec ses écailles froides.
(...)
Ô Géryon,  notre père, que jamais nous ne soyons
vassaux des hommes et des chevaux !

Fernando Villalon/ La Toriada/ Ed.Mare Nostrum/ Trad. Jacques Issorel

vendredi 8 mars 2013

Cante y baile por Derecho(s)


Marre de voir et d'entendre "...et la journée de la femme " par-ci et "...oui, un beau jour, vraiment , ce vendredi pour nos femmes, qu'on adore, hein ? " par-là.
Le 8 Mars est la date choisie, non pas pour se surprendre à dire" qu' ah bé, c'est vrai, elles existent, les pauvres bouchons, faut faire avec hein  ?... maint'nant ", mais pour rappeler les droits des femmes, certainement parmi les plus bafoués dans le monde. Y punto.

Bien que cette taylorisation langagière m'insupporte et me fait penser qu'une fois encore la pensée globale et locale, plurielle et particulière se retrouve soumise à la broyeuse idéologique, il faut tout de même en passer par là pour ne pas édulcorer la véritable dénomination de cette célébration qui , bientôt, sera rangée au même titre que la fête des secrétaires, nous rendant juste soucieux d'offrir un bouquet de fleurs à la personne de notre choix.

Donc, ne pas faire docte sur ce sujet me paraît tache ardue mais bon, en exergue et en hommage une vidéo où apparaissent Rosario " La Tremendita" , cantaora de "veras", et Rocio Molina , bailaora extra-ordinaire, pour célébrer l'histoire de ces femmes, chanteuses, danseuses ou guitaristes, aficionadas cabales, mères, soeurs et filles qui ont gagné le droit de sortir des cercles familiaux ( et le devoir d'y rester aussi, elles n'ont rien "lâché"), de s'affranchir des clichés ( et garder le droit de se les réapproprier pour mieux les "disjoncter") et parer à l'adversité des codes familiaux ou tribaux (et choisir de les transmettre avec bienveillance, comme un chemin de vie et pas comme une montée au calvaire).
Un tel duo célèbre l'histoire de ces femmes qui va, pour résumer à grand trait, de Carmen Amaya portant pantalon sur les scènes internationales et faisant frire ses sardines sur les sommiers du waldorf Astoria, en passant par Carmen Linares et son formidable travail sur "La mujer en el cante" un des disques indispensables à toute discographie un peu sérieuse, à ces travailleuses - Ana Peña, María Bala, Anica la Periñaca, Juana Vargas, Frasquita de Utrera par exemple -ramasseuses de pois chiches et d'olives,  qui dans la brutalité des années post guerre civile et franquistes affirmaient leur dignité et leur pugnacité,  une présence et un légat au travers de ces juergas de fin de journée où elles aussi, loin des regards réprobateurs des clans ou des sectaires, jetaient leurs chants et leurs danses pour participer à ces réunions, vecteurs de diversions aux fatigues et aux peines engendrées par le labeur extrême de ces " corrales de gañanias",  "réserves" des terres immenses des señoritos à main d'oeuvre bon marché.
Toutes, elles sont un pan immense de l'honneur du flamenco. Et leur droit à la scène, à la création et à la tradition nous est indispensable.
Voilà.
C'est dit.

Nb : à noter l'excellent livre d' Estela Zetania " Flamenco de gañanias" ( Ediciones Giralda )