vendredi 8 mars 2013

Cante y baile por Derecho(s)


Marre de voir et d'entendre "...et la journée de la femme " par-ci et "...oui, un beau jour, vraiment , ce vendredi pour nos femmes, qu'on adore, hein ? " par-là.
Le 8 Mars est la date choisie, non pas pour se surprendre à dire" qu' ah bé, c'est vrai, elles existent, les pauvres bouchons, faut faire avec hein  ?... maint'nant ", mais pour rappeler les droits des femmes, certainement parmi les plus bafoués dans le monde. Y punto.

Bien que cette taylorisation langagière m'insupporte et me fait penser qu'une fois encore la pensée globale et locale, plurielle et particulière se retrouve soumise à la broyeuse idéologique, il faut tout de même en passer par là pour ne pas édulcorer la véritable dénomination de cette célébration qui , bientôt, sera rangée au même titre que la fête des secrétaires, nous rendant juste soucieux d'offrir un bouquet de fleurs à la personne de notre choix.

Donc, ne pas faire docte sur ce sujet me paraît tache ardue mais bon, en exergue et en hommage une vidéo où apparaissent Rosario " La Tremendita" , cantaora de "veras", et Rocio Molina , bailaora extra-ordinaire, pour célébrer l'histoire de ces femmes, chanteuses, danseuses ou guitaristes, aficionadas cabales, mères, soeurs et filles qui ont gagné le droit de sortir des cercles familiaux ( et le devoir d'y rester aussi, elles n'ont rien "lâché"), de s'affranchir des clichés ( et garder le droit de se les réapproprier pour mieux les "disjoncter") et parer à l'adversité des codes familiaux ou tribaux (et choisir de les transmettre avec bienveillance, comme un chemin de vie et pas comme une montée au calvaire).
Un tel duo célèbre l'histoire de ces femmes qui va, pour résumer à grand trait, de Carmen Amaya portant pantalon sur les scènes internationales et faisant frire ses sardines sur les sommiers du waldorf Astoria, en passant par Carmen Linares et son formidable travail sur "La mujer en el cante" un des disques indispensables à toute discographie un peu sérieuse, à ces travailleuses - Ana Peña, María Bala, Anica la Periñaca, Juana Vargas, Frasquita de Utrera par exemple -ramasseuses de pois chiches et d'olives,  qui dans la brutalité des années post guerre civile et franquistes affirmaient leur dignité et leur pugnacité,  une présence et un légat au travers de ces juergas de fin de journée où elles aussi, loin des regards réprobateurs des clans ou des sectaires, jetaient leurs chants et leurs danses pour participer à ces réunions, vecteurs de diversions aux fatigues et aux peines engendrées par le labeur extrême de ces " corrales de gañanias",  "réserves" des terres immenses des señoritos à main d'oeuvre bon marché.
Toutes, elles sont un pan immense de l'honneur du flamenco. Et leur droit à la scène, à la création et à la tradition nous est indispensable.
Voilà.
C'est dit.

Nb : à noter l'excellent livre d' Estela Zetania " Flamenco de gañanias" ( Ediciones Giralda )

2 commentaires:

pedrito a dit…

On est loin, très loin, de la journée de la femme exploitée fin du 19 ème et début du 20 ème siècles, lorsque les salariées en lutte revendiquaient leur émancipation dans un monde pensé par les capitalistes et les curés – même si rien n’a changé, ou si peu - pour diviser et mieux opprimer les uns, les unes, et les autres.
Les journaleux d’aujourd’hui ne répètent que billevesées apprises dans leurs écoles : Fête des grand mères, des secrétaires, des catherinettes, des mères et même des pères, tout est fête et bon pour mener le « consommateur» par la braguette ou par le bout du nez : il n’y a pas plus de citoyens que de boîtes de findus avariées.
Bravo pour cet hommage combien mérité à ces artistes à l’immense talent , cantaoras et bailaoras, femmes bosseuses et courageuses jusqu’à l’héroïsme.
Même si je suis loin de savoir goûter à cet art que tu vénères, j’ai apprécié ton texte et ta fougue

Juan Arolas a dit…

"Seña María Dolores mujer de gran resistencia que hasta el reloj de la Audiencia se para cuando te ve".

Ole y viva tú.